Le comité d’éthique de la défense, cette structure de réflexion adossée au ministère des armées pour le conseiller sur les sujets les plus sensibles, a rendu, jeudi 29 avril, son deuxième avis depuis sa création, il y a un an. Après le « soldat augmenté », en décembre, il a dévoilé, jeudi, son avis sur un sujet devenu central dans la course aux armements engagée par un certain nombre de puissances : ce que les spécialistes appellent les systèmes d’armes létaux pleinement autonomes (SALA), parfois résumés sous l’appellation « robots tueurs ».
Dans un document de 47 pages, dont chaque mot apparaît pesé au trébuchet, le comité d’éthique confirme ainsi la ligne communément admise au sein des armées depuis plusieurs années au sujet des SALA. Soit le rejet de l’utilisation, sur un théâtre de guerre, de toute forme d’arme programmée dont l’homme n’aurait pas la maîtrise complète. « La France confirme qu’elle ne développera et n’emploiera pas » de SALA, écrivent ainsi les dix-huit membres civils et militaires de ce comité présidé par le conseiller d’Etat Bernard Pêcheur, et où siège notamment l’ancien chef d’état-major des armées, le général Henri Bentégeat.
En revanche, le comité d’éthique se dit favorable au développement d’armes intermédiaires, appelées systèmes d’armes létaux intégrant de l’autonomie (SALIA). Toute la nuance est dans le « i » de « intégrant ». En clair, le comité d’éthique ouvre la voie à des armes ou des « robots » qui pourront certes tuer, mais seront « incapables d’agir seuls, sans contrôle humain, de modifier leurs règles d’engagement et de prendre des initiatives létales », en s’adaptant de manière indépendante à un théâtre de guerre, par exemple. Cette définition peut concerner diverses catégories d’armes, comme des mules de transports, certains missiles ou drones.
Conscient de la compétition qui s’est engagée à l’international et des risques de « décrochages » pour l’armée française, le comité d’éthique ne ferme en tout cas pas la porte à la recherche dans « les domaines de l’intelligence artificielle de défense et des automatismes dans les systèmes d’armes ». Les travaux doivent « se poursuivre », insistent même les rédacteurs de l’avis, considérant qu’il s’agit aussi là d’un moyen de se « défendre contre ce type d’armes au cas, qui n’est pas improbable, où un Etat adverse ou un groupe terroriste entreprendrait de les employer contre nos troupes ou la population française ».
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