Répression des fraudes : Wish va disparaître des moteurs de recherche en France

EXCLUSIF. Le site de vente en ligne américain, spécialisé dans les articles à prix cassés, va être déréférencé. Une première en Europe ! Le gendarme de la Consommation lui reproche la vente de produits non conformes, voire dangereux.

Sur décision de la Direction générale de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes (DGCCRF), les principaux moteurs de recherche ne renverront désormais plus vers Wish, l'une des places de marché les plus utilisées en France. LP/ Fébus Fourcade
Sur décision de la Direction générale de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes (DGCCRF), les principaux moteurs de recherche ne renverront désormais plus vers Wish, l'une des places de marché les plus utilisées en France. LP/ Fébus Fourcade

    Wish, persona non grata sur le web français. À quelques semaines des fêtes de fin d’année, et alors que les Français préparent activement leurs courses de Noël avec en ligne de mire le Black Friday ce vendredi, le couperet est tombé. Selon nos informations, après plus d’un an d’enquête et des mois de relance avec la plate-forme de vente en ligne, la Direction générale de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes (DGCCRF) ordonne à partir de ce mercredi matin de déréférencer le site américain Wish.



    D’ici une semaine maximum, Google, Microsoft ou encore Apple - les principaux moteurs de recherche - ne renverront plus vers cette place de marché, la septième plus utilisée de France. Du jamais-vu sur le Vieux Continent ! Concrètement, si vous cherchez par exemple sur Google la dernière peluche Cars, des décorations de Noël ou encore un produit de beauté de prédilection, le moteur de recherche ne vous redirigera plus vers Wish.



    La raison ? « Nous avons prélevé 140 produits sur le site et la plupart étaient non conformes, voire dangereux », indique-t-on à Bercy. C’est particulièrement vrai pour les jouets dont 95 % étaient non conformes (l’adresse du fabricant ou l’origine du produit n’étaient pas indiquées) dont 45 % s’avéraient même… dangereux !

    « Certains jouets étaient fabriqués avec de petits éléments qui se détachaient trop facilement, au risque d’être ingérés et d’entraîner la suffocation des touts petits », précise Bercy. Même constat sur les appareils électriques dont 95 % étaient non conformes, avec 90 % de produits risqués. Exemple : la guirlande électrique de Noël, capable d’embraser votre sapin… et votre habitation. Enfin, les bijoux fantaisie, souvent à moins de cinq euros, dangereux dans 62 % des cas.

    « Ces acteurs bafouent la réglementation sur la sécurité des produits et c’est inacceptable, s’indigne le ministre de l’Économie Bruno Le Maire. Il n’y a pas de raison de tolérer en ligne ce que nous n’acceptons pas dans les commerces physiques. » D’autant que les agents de la DGCCRF ont ordonné au site américain, créé en 2010 par un ancien ingénieur de Google, de se mettre en conformité dans un délai de deux mois. Peine perdue ! Selon Bercy, les patrons basés à San Francisco n’ont pas daigné répondre aux injonctions. « Lorsque nous leur avons notifié qu’un produit était dangereux, ils avaient pour obligation de supprimer l’annonce sous 24 heures, explique-t-on au ministère de l’Économie. Ils enlevaient l’annonce ciblée dans la majeure partie des cas. Mais ils ne faisaient rien pour éviter que l’article ne réapparaisse via d’autres vendeurs. Ou, même pire, soit repostée par le même vendeur. »

    VIDÉO. Jouets achetés sur Internet : attention danger

    Autre grief : le service après-vente en cas de produits dangereux. « Wish n’indique pas le motif du rappel, reste évasif, alors que l’utilisation de l’article s’avère risquée », déplore Bercy. Contacté, le site américain n’était pas en mesure, ce mardi, de répondre à nos questions. « Les acteurs du numérique, et en particulier les places de marché, savent désormais qu’elles ne peuvent plus vendre n’importe quel produit en toute impunité ! », lâche Alain Griset, le ministre des TPE-PME.

    100
    millions
    d'utilisateurs de Wish dans le monde

    Mais est-ce malgré tout suffisant ? Ce « déréférencement réduit considérablement le risque qu’un consommateur tombe par hasard sur des offres de produits dangereux », estime Cédric O, le secrétaire d’État en charge du Numérique. Si, dans les couloirs de Bercy, on bombe donc le torse, on admet cependant que l’arme fatale n’a pas (encore) été utilisée. « Le blocage du nom de domaine, c’est-à-dire empêcher l’accès total au site sur le web français, ce serait la sanction ultime, reconnaît-on. Mais il faut que notre riposte soit graduée. Pour le moment, Wish répond encore un peu à nos demandes… » Conséquence : les fans français de la plate-forme qui revendique 100 millions d’utilisateurs dans le monde peuvent toujours y faire leurs courses en tapant directement l’adresse du site, sans passer par un moteur de recherche.

    Malgré tout, cette sanction administrative va directement frapper au portefeuille de Wish. Et ce n’est pas la seule. Une deuxième procédure, cette fois judiciaire, est en effet en cours d’instruction depuis un an pour « pratiques commerciales trompeuses ». La peine pourrait être lourde pour Wish : deux ans de prison et une amende allant jusqu’à 10 % du chiffre d’affaires.