Illustration de la future station à hydrogène installée Porte de Saint-Cloud à Paris

Illustration de la future station à hydrogène installée Porte de Saint-Cloud à Paris.

Hype // L'Express

Derrière des murs en béton de quatre mètres de haut, installés sur un parking décati de la porte de Saint-Cloud à Paris, dans le XVIe arrondissement, se dressent deux imposants conteneurs blancs reliés par des petits tubes brillants. Difficile d'imaginer qu'il s'agit là d'une innovation de portée mondiale. Et pourtant, dans quelques semaines, c'est ici qu'ouvrira la première station urbaine de production et de distribution d'hydrogène vert à forte capacité.

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Conçue par le consortium HysetCo, une dream team regroupant notamment Air Liquide, Toyota et la société de taxis à hydrogène Hype, la station sera capable de produire 1 tonne par jour de cet "or bleu". Du jamais-vu ! "C'est vraiment une vitrine à grande échelle de notre savoir-faire, se félicite Mathieu Gardies, le fondateur de Hype, à l'initiative du projet. Nous avons hybridé des technologies mondiales qui n'avaient pas l'habitude d'être associées. Et le défi était de le faire en milieu urbain."

Un électrolyseur

En effet, s'il existe déjà quatre autres sites de recharge en Ile-de-France (Orly, Roissy, porte de la Chapelle et Pont de l'Alma), c'est à la station de la porte de Saint-Cloud que HysetCo va changer d'échelle côté production. Et pour cela, il a fallu se creuser les méninges. Dix cabinets d'études ont planché pendant des mois sur le projet. "Nous avons travaillé sur 60 centimètres de profondeur seulement car nous sommes justes au-dessus du périphérique. Sous nos pieds, c'est donc une sorte de plat de spaghettis avec des tuyaux qui partent dans tous les sens et de fortes contraintes dues aux réseaux d'éclairage public, de gaz et d'eau", résume le maître d'ouvrage, François-Xavier Andreola-Allegrini.

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Les riverains, plus inquiets des places de parking retirées que des possibles nuisances sonores, n'ont rien "senti" quand Enedis a coupé et raccordé les câbles haute tension. Idem pour les réseaux d'eau, indispensables pour faire fonctionner l'électrolyseur made in USA de 3,5 mégawatts à 3 millions d'euros. "Nous pompons jusqu'à 700 litres par heure et on utilise l'électricité verte garantie par notre fournisseur pour fabriquer l'hydrogène. Derrière, on renvoie aux égouts 200 litres d'eau très minéralisée", ajoute un technicien de la station. HysetCo a cherché à la revaloriser mais peine à trouver une utilité avec les services de la Ville de Paris, qui percevra d'ailleurs une redevance (gardée confidentielle) pendant les quinze ans de la concession. "Cela rentre dans notre stratégie globale qui consiste à réduire la place de la voiture en ville et sur les véhicules restants, à accompagner et accélérer la transition énergétique", explique David Belliard, l'adjoint aux transports d'Anne Hidalgo.

10 000 taxis hydrogène pour les JO de Paris 2024

Les clients, justement, pourront faire leur plein à la même vitesse que pour un véhicule thermique et pour un prix assez proche. La "pompe" ressemble d'ailleurs beaucoup à celle des Esso, Total ou autres. "La différence, c'est que l'on programme la quantité à charger par une application mobile et que l'on ne peut pas retirer le pistolet avant que la machine ne l'autorise", détaille Mathieu Gardies, ingénieur de formation.

Hype

Recharge d'un taxi hydrogène Hype

© / DR

S'il n'existe aujourd'hui que deux petits exemplaires de voitures à hydrogène (comptez 70 000 euros chez Toyota) détenues par des particuliers en France - l'une appartient à un haut cadre de Dassault, l'autre était utilisée par Isabelle Kocher (ex-DG d'Engie) -, le site sera fréquenté par les 200 taxis de Hype dans un premier temps. Mais avec le rachat l'hiver dernier de la Slota, un groupe de taxis parisiens doté de 600 licences, Hype va passer la seconde pour monter à 700 véhicules à hydrogène en 2022. L'entreprise ambitionne d'atteindre 10 000 taxis pour les Jeux olympiques de 2024. Soit autant que le leader actuel du marché, la G7 !

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Pour financer son développement dans 15 nouvelles villes de l'Hexagone d'ici 2024 - mais aussi en Espagne -, Hype a levé en début d'année 80 millions d'euros. Et l'entreprise accélère en bouclant cette semaine une nouvelle collecte de 20 millions d'euros dans le cadre de partenariats stratégiques avec deux acteurs de l'hydrogène tricolore, McPhy et HRS. "Avec tout le soutien politique, le secteur est en train de changer d'échelle et les prix commencent à baisser", se félicite Mathieu Gardies, pour qui l'hydrogène fera à coup sûr partie des solutions à développer à côté de l'électrique.

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