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Le roi du dating Match (Tinder, Meetic) attaque Google pour abus de position dominante

L'éditeur d'applications de rencontre propose depuis des années son propre système de paiement en plus de celui de Google. Sous la menace d'une exclusion du Play Store le 1 er  juin, Match Group a porté l'affaire en justice.

Les utilisateurs de Tinder peuvent depuis des années régler leurs achats et abonnements avec un système de paiement différent de celui de Google
Les utilisateurs de Tinder peuvent depuis des années régler leurs achats et abonnements avec un système de paiement différent de celui de Google (Patrick Sison/AP/SIPA)

Par Sébastien Dumoulin

Publié le 10 mai 2022 à 13:26Mis à jour le 10 mai 2022 à 16:01

Un nouveau front judiciaire vient de s'ouvrir dans la bataille entre les développeurs et les app stores. Lundi, le n° 1 mondial des applications de rencontre en ligne, Match Group, a intenté un procès à Google devant une cour fédérale américaine. La maison mère de Tinder, Meetic, Hinge ou encore OKCupid accuse Google d'abuser de sa position dominante dans la distribution d'applications pour imposer sa solution de paiement - et le paiement de commissions comprises entre 15 et 30 % sur toutes les transactions à l'intérieur de son magasin.

Depuis des années, Match Group propose sa propre solution de paiement aux utilisateurs de ses services. Mais Google entend mettre fin à cette pratique. En septembre 2020, le groupe avait « clarifié » les règles de son magasin et prévenu les développeurs que seule sa solution serait désormais autorisée. Google avait donné deux ans aux applis pour se mettre en conformité, sous peine de se voir exclues du Play Store. L'échéance a été reculée de six mois, au 1er juin prochain. Elle est désormais imminente et pousse Match à aller en justice.

Une affaire de gros sous

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« Il y a dix ans, Match Group était le partenaire de Google. Nous sommes maintenant son otage », dénonce la plainte du groupe. Le roi du dating accuse le géant de Mountain View d'avoir consolidé son emprise sur la distribution d'applis dans Android en s'appuyant sur les développeurs les plus populaires, auxquels il aurait « donné des assurances » concernant la liberté d'utiliser leurs propres systèmes de paiement, avant de finalement leur imposer le sien - et les commissions afférentes.

Match Group assure que la possibilité d'utiliser son propre système de paiement lui offre plus de flexibilité - comme la possibilité de proposer le paiement échelonné pour les abonnements ou encore des offres promotionnelles spécifiques. Le roi du dating explique aussi qu'il garde ainsi la main sur les précieuses données de ses utilisateurs, qu'il accuse Google de vouloir récupérer au profit de son activité publicitaire.

Mais le dossier est surtout une affaire de gros sous. « Les efforts de Google pour priver les utilisateurs du choix de leur plateforme de paiement sont motivés par la cupidité », dénonce Match Group, assurant que « la « taxe » Google est presque 10 fois plus élevée que les frais réels facturés par des organismes de paiement sur des places de marché comparables et concurrentielles ».

Des alternatives inefficaces

Pour sa défense, Google renvoie l'accusation de cupidité à l'envoyeur : « il s'agit simplement de la poursuite de la campagne de Match Group en faveur de ses propres intérêts pour éviter de payer en échange de la valeur importante qu'ils reçoivent des plateformes mobiles sur lesquelles ils ont bâti leur activité » - alors que le spécialiste des rencontres en ligne est éligible au taux réduit de 15 % applicable aux abonnements - « le taux le plus bas des grandes plateformes applicatives ». Comme son grand concurrent Apple, Google assure que les commissions rémunèrent la mise à disposition, l'entretien et la sécurisation de son magasin d'applis.

Google ajoute que d'autres magasins alternatifs existent sur Android, où les développeurs sont libres de faire ce qui leur chante. « C'est comme dire que vous n'avez pas à prendre l'ascenseur pour aller au 60e étage d'un immeuble ; vous pouvez juste escalader la façade », raille Match Group. Le roi du dating pointe que le « Play Store » domine le marché de la distribution dans l'écosystème Android et qu'il est impossible économiquement d'y renoncer.

Vague de récriminations

La plainte de Match Group vient grossir la vague montante des récriminations contre le modèle très fermé et très rémunérateur des magasins d'applis de Google et d'Apple. Aux Etats-Unis, un procès similaire intenté par Epic, l'éditeur du jeu Fortnite, contre Apple a abouti en septembre sur une première décision marquante. La justice a estimé qu'Apple n'était pas en position dominante, mais lui a dénié le droit d'imposer son système de paiement. Un texte de loi, l' « Open App Markets App », est également en discussion et pourrait aboutir à d'importantes mesures d'ouverture. La Corée du Sud a, de son côté, déjà légiféré et imposé à Apple et Google d'autoriser les systèmes de paiement tiers dans leurs app stores.

En Europe, Apple a été formellement accusé l'an dernier d'abus de position dominante suite à une plainte du géant suédois du streaming musical Spotify. C'est d'ailleurs Spotify qui va tester un « programme pilote » annoncé fin mars par Google pour… utiliser des systèmes de paiements tiers dans le Play Store. De quoi faire tousser Match Group, qui assure ne pas avoir été autorisé à participer à l'expérimentation : « au moment même où Google met fin à la possibilité historique de Match Group d'offrir aux utilisateurs un choix de systèmes de paiements, il offre à Spotify l'occasion de le faire pour la première fois, tout en refusant les autres demandes de participation parce que le concept est « trop nouveau »».

Sébastien Dumoulin

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